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 La saturation des tissus 
Pterois miles / Rascasse volante / Lionfish
Rascasse volante

Si la loi de Henry ne vous dit rien, commencez par découvrir ce qu'est la dissolution des gaz. Vous pourrez ensuite poursuivre par le le petit passage qui la concerne dans la page des lois physiques. Le phénomène de saturation des tissus en azote est, lui, brièvement décrit sur la page des paliers de décompression.

Sujets abordés dans cette page :
Pression partielle et tension d'un gaz
La période des tissus
La désaturation
Le coefficient de sursaturation critique

Pression partielle et tension d'un gaz

L'air que nous respirons contient approximativement 80% d'azote (N2) et 20% d'oxygène (O2). Si on considère que la pression atmosphérique est de 1 bar, la pression partielle (part de pression due à l'azote) est : PpN2 = 0,8 bar. De même PpO2 = 0,2 bar. Dans un verre d'eau, il y a de l'azote et de l'oxygène dissouts dans les mêmes proportions. Pour définir la quantité de gaz dissout dans un liquide, on ne parle plus de pression partielle mais de tension. La tension d'un gaz dans un liquide ou un tissu s'exprime en bar. A saturation les échanges gazeux entre l'air et le liquide peuvent être considérés comme nuls : la tension d'un gaz est alors égale à la pression partielle de celui-ci dans l'air. Dans l'eau d'un verre, la tension d'oxygène est : TO2 = 0,2 bar et de même, on a : TN2 = 0,8 bar.

Au niveau de la mer, au début d'un séjour de plongée et avant la première plongée, la tension d'azote dans nos tissus est aussi de 0,8 bar : nous sommes à saturation. Il n'en va pas de même pour l'oxygène. L'oxygène est principalement véhiculé dans le corps par l'hémoglobine du sang. Une partie non négligeable de l'oxygène respiré circule sous forme dissoute. Cet oxygène n'a pas à inquiéter le plongeur car il sera consommé de toutes façon par nos cellules. Le principal déchet de combustion de l'oxygène est le gaz carbonique (CO2) qui sera acheminé par le sang (dans l'hémoglobine et sous forme dissoute) vers les poumons.

Pendant une plongée, nous exposons notre corps à une pression ambiante importante. En plongée, la pression partielle d'azote dans l'air respiré est plus importante car cet air est à la pression ambiante. Par exemple à 30 m, la pression absolue est de 4 bar, donc PpN2 respiré = 3,2 bar. Si la phrase précédente vous pose un problème, allez donc faire un petit tour du coté de chez Dalton (calcul des pressions partielles) et revenez dans une minute... Ça y est ? on continue. On se souvient qu'au début de la plongée la tension d'azote dissout dans nos tissus est de 0,8 bar. La différence entre la pression partielle d'azote respiré et la tension d'azote dissout dans les tissus va provoquer une nouvelle saturation des tissus en azote. Ça va devenir intéressant, car les tissus ne se saturent pas tous à la même vitesse...

La période des tissus

La période d'un tissus est le temps qu'il va mettre pour arriver à la moitié de la saturation. Dans le cas de nos plongeurs qui viennent d'arriver à 30 m, il y a une différence de 2,4 bar entre TN2 et PpN2 respiré (3,2 - 0,8). Cette différence s'appelle le "gradient". Si nos plongeurs restent à 30 m, de l'azote va se dissoudre dans les tissus pour tendre vers la saturation. Si on restait suffisament longtemps à cette profondeur, tous les tissus auraient une TN2 de 3,2 bar (bonjour les paliers !).

Revenons à la période et prenons le cas d'un tissus de période T = 15 minutes. Après 15 minutes de plongée, ce tissu aura absorbé la moitié du gradient initial, sa tension d'azote sera donc : TN2 = 0,8 + (2,4 / 2) = 2 bar. Au bout de 15 minutes de plongée la saturation du tissus n'est pas atteinte, le nouveau gradient est 1,2 bar (nouvelle différence entre TN2 et PpN2). Si les plongeurs restent encore 15 minutes à cette profondeur, TN2 atteindra une valeur de 2 + (1,2 / 2) = 2,6 bar. Le gradient ne sera plus alors que de 0,6 bar.

Les tissus qui se saturent vite (sang, graisse...) sont appelés "tissus courts". Leur période peut n'être que de quelques minutes. Les "tissus longs" (os, tendons...) ont des périodes pouvant atteindre plusieurs heures.

La désaturation

Lorsque la PpN2 respiré est supérieure à la TN2 dissout dans un tissu, celui-ci se sature en azote. Lors de la remontée la pression absolue (ambiante) va baisser. Il arrivera un moment où la pression absolue sera inférieure à TN2. le tissu est dit en sursaturation et il va alors commencer à se désaturer en azote. Le phénomène de désaturation suit les mêmes règles de progression que la saturation. Certains tissus se désatureront vite, d'autres le feront plus lentements (tissus courts et tissus longs).

Lors d'une désaturation normale, l'azote dissout dans le sang repassera dans l'air au niveau des alvéoles pulmonaires. Ce phénomène est assez rapide car le sang est un tissu court. Le sang qui repart alors vers les organes a une TN2 plus faible qu'avant et s'en va irriguer les organes qui, eux, ont encore une TN2 importante. L'azote de ces organes va alors passer dans le sang (plus ou moins vite en fonction de la période du tissus) qui l'apportera aux poumons pour un nouveau cycle

Pendant la plongée, le sang s'était saturé en azote et l'avait distribué a tout le corps. Lors de la remontée, c'est encore lui qui véhicule l'azote dans le sens contraire

Si la pression ambiante est très inférieure à la TN2 d'un tissus, l'azote qu'il contient n'aura pas la patience de se laisser véhiculer par le sang jusqu'aux alvéoles des poumons. C'est ce qui arrive lorsqu'on remonte trop vite (la pression absolue diminue rapidement). En effet, la tension d'azote n'étant pas suffisament compensée par la pression ambiante, l'azote reprendra sa forme gazeuse dans le tissu. On dit que le tissu est alors en sursaturation critique. D'où une formation de bulles d'azotes qui provoqueront un accident de décompression. Les tables de plongées sont calculées pour nous donner des profils de remontée qui empêcheront un tissu de se trouver dans une telle situation. Pour établir ces tables, on associe à chaque tissu (caractérisé par sa période), un coefficient de sursaturation critique :

Le coefficient de sursaturation critique

Les premières tables de plongées ont été calculées en considérant qu'un tissus pouvait supporter une TN2 deux fois plus grande que la pression ambiante sans que n'apparaîssent de bulles dans ce tisssu. Cette approximation n'était pas assez sévère. Avec l'expérience on s'est aperçu que tous les tissus n'ont pas le même seuil de tolérance. Voilà pourquoi on a été amené à déterminer pour chaque groupe de tissus l'écart maximum qu'il peut supporter entre la TN2 et une pression ambiante plus faible.

Le coefficient de sursaturation critique d'un tissus se note Sc. C'est un simple nombre. Prenons le cas d'un tissu dont le coefficient Sc = 1,6. Cela signifie que TN2 pourra être au plus 1,6 fois plus grande que la pression ambiante. C'est une valeur à ne pas dépasser. Les premières tables de plongées utilisaient un coefficient Sc = 2 pour tous les tissus !

Le but des paliers de décompression est de faire en sorte que pour chacun de nos tissus le coefficient Sc ne soit jamais dépassé. Si on connait TN2 et Pabs. on peut calculer TN2 / Pabs pour vérifier qu'on est bien au dessous du coefficient Sc du tissu considéré.